Éthique environnementale
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Курс: | Les relations Humains Nature(s) en anthropocène |
Книга: | Éthique environnementale |
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Дата: | понедельник, 4 ноября 2024, 02:38 |
Описание
1. A propos de la séquence
Acquis d'apprentissage
- Comprendre que le rapport des sociétés modernes à la nature est une construction socio-historique basée sur l’exploitation de cette dernière. Cette relation peut être redéfinie selon les éthiques environnementales.
- Il existe plusieurs visions de l’éthique environnementale. L’écocentrisme, le biocentrisme et la vision pragmatique en sont les principales visant chacune à répondre à la crise environnementale que connaissent les sociétés humaines, mais ne sont pas les seules.
2. De quoi s'agit-il ?
L’éthique environnementale est un champ d’études visant à restituer la multitude de visions définissant les relations entre l’Homme et son environnement. Pour Aldo Leopold dans son livre A Sand County Almanac publié en 1949, précurseur de l’éthique environnementale, c’est « l’éthique chargée de définir la relation de l’Homme et de la Terre, ainsi qu’aux animaux et aux plantes qui vivent dessus ». Il existe plusieurs concepts différents de l’éthique environnementale : le biocentrisme, l’écocentrisme et le pragmatisme.
2.1. Histoire des éthiques environnementales
On situe l’acte de fondation d’une conscience environnementale visant à préserver et conserver la nature à 1872 et la création du parc national de Yellowstone aux États-Unis.
Un siècle plus tard, la littérature de la crise environnementale se consolide avec la publication du Rapport Meadows en 1972 et de Silent Spring de Rachel Carson sur l’incidence des pesticides sur l’environnement et la santé humaine. Selon Lynn White, historien médiéviste des techniques, dans Les racines historiques de notre crise écologique publié en 1984, la crise environnementale trouve ses racines dans l’anthropocentrisme de la tradition judéo-chrétienne, induisant une déconnexion entre l’Homme et son environnement, et l’enjoignant à le dominer davantage qu’à le protéger. Les éthiques environnementales tentent de produire de nouvelles valeurs éthiques et morales visant à dépasser la vision anthropocentrée de la tradition judéo-chrétienne.
2.2. Le biocentrisme
Définition
Le biocentrisme se définit par le fait que « tout individu vivant est, à égalité avec tout autre, digne de considération morale » (Catherine Larrère). Cette éthique environnementale applique la « valeur intrinsèque » kantienne aux êtres vivants et non plus seulement aux êtres humains. Alors que Kant affirmait que les animaux n’avaient qu’une valeur instrumentale, le biocentrisme tente de leur donner une dignité.
Selon Paul Taylor (1986), cette notion implique trois principes :
- tous les êtres vivants ont un statut égal ;
- on ne peut traiter une valeur intrinsèque comme un simple moyen ;
- chaque entité individuelle a droit à la protection.
Ainsi le biocentrisme admet que les êtres humains ne sont pas seuls à détenir une valeur intrinsèque. La Convention de Rio sur la diversité biologique adoptée en 1992 dispose, dans son article Premier : « La biodiversité détient une valeur intrinsèque ».
Critique
Le biocentrisme est critiqué car il ne s’intéresse ni au non-vivant (paysages, écosystèmes, etc.) ni aux liens entre vivant et non-vivant.
2.3. L'écocentrisme
Définition
Selon Aldo Leopold, dont le livre A Sand County Almanac (1949) est considéré comme l’acte fondateur de l’écocentrisme, « Une chose est juste lorsqu’elle tend à préserver l’intégrité, la stabilité et la beauté de la communauté biotique. Elle est injuste lorsqu’elle tend à l’inverse » (Leopold, 1949). Alors que l’éthique biocentrique est déontologique et énonce des normes universelles, l’éthique du respect, la Land Ethic vise davantage à la non-intervention.
Pour A. Leopold, il faut penser en termes d’interdépendance des éléments d’un même système et l’appartenance à un ensemble (comme une montagne, par exemple). Chaque élément a des devoirs et des obligations découlant de l’appartenance à cette totalité.
Pour Baird Callicott, il y a à la fois une valeur diachronique et synchronique dans l’écocentrisme :
- diachronique car l’écocentrisme s’inscrit en continuité avec la théorie de l’évolution de Darwin : tous les êtres vivants sont liés à une même histoire naturelle. Pour A. Leopold (1949), « l’Homme n’est qu’un compagnon voyageur d’autres espèces dans l’Odyssée de l’évolution » ;
- synchronique car la science écologique étant « l’étude des relations des organismes entre eux et avec leur environnement naturel » (Callicott, 2021), l’écologie permet alors de penser le lien entre tous les membres d’une même communauté biotique, en dehors de leur évolution.
Critique
La Land Ethic est critiquée car elle vise un résultat global : une communauté mixte, la « communauté biotique », et ne prend pas en compte la valeur des individus. Elle sacrifie ainsi l’individu au profit de la communauté. Dès lors, cette vision érige l’être humain comme égal de tous les autres éléments de la communauté, alors même qu’il est la première cause de la destruction de l’intégrité de cette communauté biotique. L’éthique d’A. Leopold est conséquentialiste : la qualité d’une action juste ou non se mesure à ses conséquences sur la communauté mixte. Se comporter en écologiste, c’est intervenir à bon escient, et ne pas craindre de laisser sa marque (comme la coupe d’un arbre, par exemple).
Aussi, l’écocentrisme promeut un équilibre écosystémique des membres de la communauté biotique, alors que les développements récents de l’écologie se concentrent davantage sur une écologie de la perturbation plutôt que la recherche de l’équilibre.
2.4. Le pragmatisme
Définition
Selon l’éthique environnementale pragmatique, la nature fournit des biens (matières premières, produits agricoles, etc.) et des services (pollinisation, fixation des nitrates, séquestration du dioxyde de carbone…) que les êtres humains peuvent exploiter comme une ressource. Il n’est dès lors pas considéré comme un problème d’exploiter ces ressources allouées par la nature.
Pour Bryan Norton dans Why Preserve Natural Variety (Princeton University Press, 1987), philosophe de l’environnement, un programme de protection de la nature est justifiable d’un point de vue anthropocentrique. Valoriser l’Homme n’est pas forcément synonyme d’une dévalorisation de la nature. Les pragmatistes ont une vision pluraliste et relationnelle : il existe pour eux une quantité de raisons de donner une valeur, et les valeurs différentes ne sont pas isolées entre elles, sortant du paradigme de la valeur intrinsèque. Les pragmatistes cherchent donc à trouver un consensus entre les valeurs plutôt qu’à ne se concentrer que sur la valeur intrinsèque.
Ainsi, l’Homme se trouve au centre des valeurs, et la pluralité des justifications tant qu’elle sert à protéger la nature est bonne pour trouver un consensus. Il faut ainsi favoriser la délibération.
Critique
Cette vision est critiquée car elle oublie les non-vivants dans la délibération. Mais le pragmatisme n’est pas un choix entre anthropocentrisme, biocentrisme et d’autres orientations. Pour la vision pragmatiste, il s’agit de délibérer sur chaque action par une gouvernance organisée afin de choisir une approche ciblée des problématiques environnementales.
3. Ressources complémentaires
Références bibliographiques / webographiques
Ouvrages
- Aldo Leopold, A Sand County Almanac, Oxford University Press, 1949.
-
Lynn White, Les racines historiques de notre crise écologique, PUF, 2019 (1ère ed. 1967).
Articles
- Alain Létourneau, « Pour une éthique de l’environnement inspirée par le pragmatisme : l’exemple du développement durable », Vertigo, vol. 10 n°1, avril 2010.
- Catherine Larrère, « Les éthiques environnementales », Natures, Sciences, Sociétés, vol. 18, 2010, p. 05-413
Pour aller plus loin...
Vidéos
- Sylvie Ferrari, « Éthique environnementale et développement durable », Canal UVED, 30 juin 2015.
- Catherine Larrère, « Éthiques environnementales », Canal UVED, 24 avril 2015.
Articles
- C-I. Roquebert, "Si écologie et capitalisme sont incompatibles, comment "re-naturer" les humains ?", The Conversation France, Novembre 2023
4. Crédits
Cette leçon fait partie du Socle commun de connaissances et de compétences transversales sur l'anthropocène (S3C), produit par la Fondation UVED et soutenu par le Ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche.
Elle est mise à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons - 4.0 International : Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions
Pour la formation continue ou professionnelle, les modalités d’usage sont à déterminer avec UVED et doivent faire l’objet d’un contrat définissant les conditions d’usage et de commercialisation. Contact : s3c@uved.fr
Première édition : octobre 2023
Dernière mise à jour : décembre 2023