Enseignants : Laurent Devisme, Antoine Hardy

Le débat public est désormais saturé de sujets qui font l’objet d’une expertise technique très poussée, mais sont également devenus des enjeux politiques, mêlant des arguments juridiques, moraux, économiques ou encore sociaux. Si ce constat déborde largement la problématique environnementale, il s’y déploie toutefois de manière particulièrement accrue. La construction de parcs éoliens, les transformations des pratiques agricoles ou des modes de mobilités sont autant de sujets dans lesquels les savoirs scientifiques ne sont pas encore complètement stabilisés.

Dans cet univers incertain, naissent régulièrement des « controverses », à savoir des situations dans lesquelles des désaccords entre plusieurs acteurs (ou groupes d’acteurs) engagent des savoirs spécialisés sans parvenir à imposer complètement leur vision de l’enjeu. S’affrontent alors des représentations collectives concurrentes, des faits et des valeurs, ou encore des intérêts contradictoires.

En nous inspirant de la démarche initiée notamment par le sociologue des sciences Bruno Latour, nous proposons aux étudiant de s’essayer au travail de « cartographie » d’une controverse environnementale (locale). L’objectif général de ce module est d’aider les étudiantes et les étudiants à comprendre les logiques d’articulation entre le champ scientifique et la société, mais aussi de saisir la complexité des débats publics par le prisme d’une étude de cas concret.

Trois types d’apprentissage sont ainsi envisagés par ce module :
1) L’acquisition de quelques rudiments de sociologie (des sciences et des techniques, de l’action publique et, bien sûr, des controverses)
2) L’expérimentation de quelques outils / méthodes d’enquête des sciences sociales

3) La capacité à restituer de façon dynamique le résultat d’une enquête, en mobilisant divers outils (numériques ou non). 

Le module articule trois temps :

1) Le temps des lectures et de la réflexion collective : analyser les controverses. Deux séances dédiées. A partir de la lecture de trois textes, chacun présentés par un groupe d'étudiants, l'objectif de ces séances et d'échanger sur les enjeux théoriques et méthodologiques de l'analyse d'une controverse. Ces deux séances seront également l'occasion de discuter de l'organisation du travail d'enquête sur l'étude de cas (un à deux choisis).

2) Le temps de l'enquête : déplier la controverse. L’enjeu consiste ici à réaliser une enquête de terrain permettant de répondre à différents types de questions : Quels sont les acteurs impliqués ? Quels discours tiennent-ils quant au sujet ? Sur quels types de valeurs, de représentations mais aussi d’intérêt reposent leur position ? Quel type d’interaction caractérisent ces acteurs (coalition, confrontation, etc.) ? Dans quelles arènes s’expriment-ils ? Etc. Pour cela, les étudiants sont invités à s’initier aux méthodes d’enquête (qualitatives et quantitatives) : entretiens, travail d’archive, analyse documentaire, analyse voire production de statistiques, sondages, cartographie du web, etc. Des rendez-vous pourront être organisés avec les enseignants pour faire le point sur l'avancée de ce travail d'enquête.

3) Le temps de la restitution : représenter la controverse. Il s'agira ici pour l'ensemble du groupe de restituer le travail d'enquête. Le format est au choix des étudiantes et étudiants. Il peut prendre la forme d'une page Internet permettant de naviguer dans la controverse, mais aussi d'autres productions (podcast, documentaire, revue, etc.). Une autre option, plus originale encore, consiste à organiser un "théâtre de de la controverse", permettant à chacun de rejouer la controverse (par exemple sous la forme d'un débat public).