2. Histoire de la composition de l'atmosphère

2.1. Comment tracer l’évolution de l’atmosphère terrestre dans le passé ?

Reconstituer la composition de l’atmosphère dans le passé paraît complètement inconcevable ! Comment les gaz qui composent l’atmosphère terrestre pourraient-il laisser des traces durables ? Pourtant, c’est bien ce défi en apparence impossible que la recherche parvient aujourd’hui à relever en utilisant plusieurs indicateurs ou « proxies » (« proxy » au singulier). Ces proxies sont des témoins directs ou indirects de la composition de l’atmosphère à un moment donné de l’histoire de la Terre.

En voici deux exemples :

  • L’observation des roches les plus anciennes préservées à la surface de la Terre permet de décrire l’apparition de l’oxygène dans l’atmosphère terrestre. Au début de l’histoire de la Terre, la couleur dominante des roches contenant du fer est un gris bleuté qui traduit la présence exclusive de ce fer sous sa forme réduite (c’est-à-dire non oxydée). Il y a environ 2,5 milliards d’années, les mêmes roches prennent une couleur rouge-orangée caractéristique de la forme oxydée du fer (celle qu’on observe communément dans la rouille). Ce changement n’est possible qu’à partir du moment où l’oxygène est présent dans l’atmosphère en quantités suffisantes. Les interactions entre les roches contenant du fer et l’atmosphère permettent donc de déduire (= proxy indirect) la teneur en oxygène de cette dernière. Ce qui permet d’affirmer que l’atmosphère initiale de notre planète était initialement pauvre en oxygène avant de connaître un épisode important d’enrichissement entre -2,5 et -2,2 milliards d’années (voir la séquence sur le système Terre à l'échelle des temps géologiques).
  • Dans le cas désormais célèbre des bulles piégées dans les glaces polaires, nous avons affaire à un indicateur direct : les gaz contenus dans ces bulles sont tout simplement des vestiges de l’air qui s’est trouvé mélangé aux cristaux de glace lorsque la neige fraîche s’est déposée. Cet air finit par être emprisonné (on pourrait dire « fossilisé ») dans un piège hermétique lorsque la neige se transforme en glace sous l’effet de la compaction et du froid. Les bulles ainsi formées constituent donc un échantillon de la composition de l’air contemporain des précipitations neigeuses qui nous parvient directement et qui peut être analysé comme le serait un échantillon d’air actuel. C’est grâce à l’analyse des variations de composition de ces bulles au cours du temps que l’on a pu mettre en évidence la relation entre la teneur en CO2 de l’atmosphère et les alternances entre périodes glaciaires (air appauvri en CO2) et interglaciaires (air enrichi en CO2).

Ces deux exemples emblématiques ne doivent pas faire oublier que d’autres types de traces sont laissées par les changements de composition de l’atmosphère terrestre au cours des temps géologiques aussi bien dans les roches que dans les fossiles. Elles constituent autant de proxies utilisables pour remonter à l’information recherchée.