Principes de l'action internationale
2. Principes de l'action internationale
2.1. Le principe des responsabilités communes mais différenciées, ou principe de la responsabilité historique des pays développés
Ce principe découle du souhait d’impliquer de manière différentielle les États dans le traitement et la résorption des problèmes environnementaux, en tenant compte de leurs niveaux respectifs de développement économique et social. Ce souhait a été formalisé notamment en 1972, lors de la Conférence de Stockholm (Suède) sur l’environnement humain (premier sommet de la Terre), avec l’idée que l’équité devait être au centre de la coopération internationale en matière de protection de l’environnement à l’échelle planétaire . Le principe a été entériné en 1992, dans la Déclaration de Rio de Janeiro (Brésil), à l’issue du Sommet des Nations Unies sur l’environnement et le développement (troisième sommet de la Terre). Il préconise une géométrie variable appliquée aux engagements des États dans la résolution des problèmes environnementaux internationaux, avec des engagements plus élevés pour les pays développés que pour les pays en développement.
La convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques, adoptée lors du Sommet de Rio de Janeiro en 1992, est structurée sur la base de ce principe. Elle définit un groupe de pays dits de l’annexe I de cette convention. Ce sont des pays développés associés aux pays de l’Europe de l’Est, dont les économies, dans les années 1990, étaient dites en transition vers le système du marché (système capitaliste). Ce groupe de pays constitue ce qu’on appelle « les pays du Nord ».
Le reste des pays est de fait le reste du monde, c’est-à-dire les pays en développement, y compris les pays émergents.
Le protocole de Kyoto (Japon), adopté en 1997 pour compléter et mettre en application la convention sur les changements climatiques, est également structuré sur la base de ce principe qui, de fait, a donné lieu à une bipolarisation ou un clivage Nord / Sud du monde.
Source : Moise Tsayem Demaze. Le protocole de Kyoto, le clivage Nord-Sud et le défi du développement durable. Espace Géographique, 2009, pp.139-156.
Le découpage qui en a résulté est semblable à quelques exceptions près aux autres découpages géopolitiques distinguant le Nord et le Sud, par exemple celui du rapport Brandt . La communauté internationale a adopté le principe des responsabilités communes mais différenciées en le considérant comme principe de base pour la répartition des efforts à fournir dans le cadre de la lutte contre les changements climatiques. Ainsi, la convention sur les changements climatiques (CCNUCC) indique :
- Article 3 : sur la base de « l’équité » et des « responsabilités communes mais différenciées », les pays développés doivent être à l’avant-garde de la lutte contre les changements climatiques. Cet article ajoute que les « besoins spécifiques » et la « situation spéciale » des pays en développement doivent être pris en compte dans la répartition des efforts à fournir en vue de résorber la crise climatique et ses conséquences.
- Article 4 : les pays développés ainsi que l’ensemble des pays figurant dans l’annexe I doivent prendre des engagements spécifiques contenant des mesures et politiques visant à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre pour les ramener à leur niveau de 1990. Il ajoute que les pays développés doivent, en outre, fournir des ressources financières nouvelles et additionnelles pour couvrir la totalité des coûts encourus par les pays en développement du fait de l’exécution de leurs obligations conformément à la convention.
L’inscription de ce principe dans la convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) et dans le protocole de Kyoto a constitué un acte géopolitique majeur dont les implications semblent avoir été sous-estimées par les Etats. C’est sur la base de ce principe que les pays non développés, y compris des pays émergents comme la Chine, l’Inde ou l’Afrique du Sud, ont longtemps refusé de prendre des engagements chiffrés de réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre. Les États-Unis ont refusé de ratifier le protocole notamment parce qu’il exonère la Chine. Les difficultés de l’application de ce principe expliquent, au moins en partie, les péripéties de la gouvernance internationale du climat ainsi que l’insuccès de la lutte contre les changements climatiques telle qu’elle est orchestrée par la communauté internationale .
Le principe des responsabilités communes mais différenciées est le socle sur la base duquel est orchestrée la conception de la coopération internationale en matière de protection de l’environnement et plus précisément en matière de lutte contre les changements
climatiques. L’engagement des Etats, et les actions auxquelles ils participent, reposent essentiellement sur ce principe. Il a été très déterminant dans le cadre de la mise en œuvre de la convention climat et du protocole de Kyoto. Il est considérablement
assoupli depuis 2015, avec l’adoption de l’Accord de Paris.